Les questions ont été claires et précises, mais les réponses ont été plutôt évasives. Tel est le constat de nombreux observateurs concernant les explications données par le président de la République Andry Rajoelina, lors de sa conférence de presse télévisée de la soirée de ce dimanche 16 juillet dernier.
Sauf peut-être en ce qui concerne les réalisations de ses quatre années et demie de mandat, et sur lesquelles il s’est montré prolixe, Andry Rajoelina a été plutôt réticent sinon évasif dans ses réponses. Cela concerne au moins deux sujets d’importance capitale dont la question sur sa double nationalité et la question relative à sa candidature à la prochaine présidentielle.
Les mêmes réponses, pour ne pas dire le même refrain. Voilà ce que l’on retiendra de ses réponses à ces deux questions. « Êtes-vous Malagasy ou Français, Monsieur le Président ? », lui a-t-on demandé. Réponse : « Je suis Malagasy de père et mère, et personne n’osera dire le contraire. C’est un sang malagasy qui coule dans mes veines… ». Certes, cela est vrai et incontestable. Malheureusement, Andry Rajoelina a poursuivi par une esquive en citant, entre autres, le cas de l’ancien président des États-Unis, Barack Obama qui est de souche kenyane, ou de Nicolas Sarkozy qui est un Grec, ou encore d’autres présidents qui auraient même trois ou quatre nationalités étrangères. Visiblement gêné par cette question, Andry Rajoelina a préféré se retrancher en invitant les uns et les autres à se référer sur certaines dispositions du Code de la nationalité malagasy, notamment et outre l’article 42 de cette loi, en ses articles 45 et 90.
Mais la grande question posée a trait à sa candidature à la prochaine élection, et donc à sa propre succession. Malheureusement encore, Andry Rajoelina n’y a pas répondu, préférant s’en remettre au choix du peuple pour celui qui va prendre les rênes du pays. Auparavant, il a toutefois dressé un profil de ce que doit être un président de la nation : celui-ci ou celle-ci devrait être une personne honnête, juste, patriote et avoir une vision claire pour la destinée et le développement du pays. Du coup, nombreux ont vite conclu que cela ne correspond point à son profil… car tout n’est que diversion pour cacher les tristes réalités endurées par les Malagasy depuis ces dernières années.
On aurait pourtant souhaité qu’il réponde franchement et clairement à ces deux questions très précises et directes qui lui ont été adressées. Cela aurait, au moins, fait taire toutes les mauvaises langues et partant mis un terme à toutes les élucubrations et autres polémiques.
« Pression » ?
Le fait est que, jusqu’à preuve du contraire et en dépit du fait qu’il a, lui-même, déclaré que son parti TGV avec ses alliés du MAPAR ou de l’IRD a toujours été présent aux différentes élections qui se sont succédé depuis, Andry Rajoelina aime plutôt entretenir le suspense, et attendre, cette fois, le dernier moment pour se décider sur la question. En tout cas, il a fermement insisté que ses préoccupations du moment portent plutôt sur le développement et pas sur cette idée de candidature à l’élection. Si cela devait se décider au niveau d’un congrès national, comme le font toutes les grandes formations politiques, il nous semble que jusqu’ici, ce n’est pas à l’ordre du jour du TGV. Et d’ailleurs, après le clash qui s’est produit lors du soi-disant premier congrès national du parti en 2010 (sauf oubli), les choses ont pris une autre tournure. Andry Rajoelina avait été plébiscité pour être le candidat du TGV à l’élection de 2013… mais il fut frappé par le fameux « ni, ni » de l’époque.
Du coup, le TGV devait se rabattre sur certains ministres de l’époque comme Jules Etienne ou Hery Rajaonarimampianina. Mais le choix s’est finalement porté sur ce dernier. Un homme de confiance d’Andry Rajoelina mais devenu, en 2018, un adversaire, et pour cette fois encore, un potentiel concurrent au cas où les deux hommes prétendent encore s’aligner à la course. En effet, Hery Rajaonarimampianina n’a pas encore non plus décidé jusqu’ici de sa candidature. Même si ses dernières déclarations, dans son fief de Sabotsy Namehana le laissent clairement entrevoir. « Tsy misy matahotra ny hifaninana amin’ireo » (littéralement : je n’ai pas peur de les affronter), avait-il annoncé.
En attendant, dans certains milieux plus ou moins avertis, on chuchote fortement une manœuvre, pour ne pas dire « pression », de certaines grandes puissances qui obligerait Andry Rajoelina à renoncer à une nouvelle candidature à la prochaine présidentielle.
À une autre question, concernant les fameuses « Îles malagasy » ou Îles Éparses, Andry Rajoelina s’est rattrapé en annonçant que « le combat continuera » et qu’il n’a jamais eu l’intention d’abandonner la partie. Mais malheureusement, encore une fois, un Français oserait-il aller à l’encontre d’une décision de son gouvernement ? En parlant d’IEM, puisque c’est le vocabulaire en vogue depuis l’accession d’Andry Rajoelina à la magistrature suprême du pays, disons plutôt qu’en l’état actuel des choses, on serait tenté de dire qu’on aurait maintenant affaire aux « Îles à Effacer des Mémoires ».
