Sans surprise, la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) vient de prouver sa partialité envers l’un des candidats à l’élection présidentielle prévue au 9 novembre prochain pour le premier tour. Il fallait s’y attendre et cela n’a rien d’étonnant.
Par son arrêt n°06 HCC/AR du 9 septembre dernier, la Cour a purement et simplement rejeté les différentes requêtes demandant l’invalidation de la candidature de l’actuel président de la République Andry Nirina Rajoelina, au motif que ce dernier n’est plus Malgache depuis qu’il a acquis la nationalité française, en novembre 2014. Andry Rajoelina lui-même l’a déjà confirmé et conforté lors d’une déclaration solennelle, notant que « ce n’est pas un petit papier de 8cm qui va l’empêcher d’être un patriote malgache… ».
S’en tenant visiblement à cette déclaration d’Andry Rajoelina, la HCC aura vite fait de la conforter par son deuxième considérant de sa décision n°11-HCC/D3 du 9 septembre 2023 ainsi stipulé: « Considérant que l’article 79 alinéa 2 de l’ordonnance n°60-064 du 22 Juillet 1960 portant Code de la nationalité malagasy dispose que « le certificat de nationalité, délivré conformément aux articles 87 et suivants fait foi jusqu’à preuve du contraire de la nationalité malagasy» ; que l’article 55 de la même loi énumère les différents décrets constatant la perte de la nationalité malagasy : « le décret autorisant la perte de la nationalité malagasy, le décret déclarant la perte de la nationalité malagasy ou le décret portant déchéance de la nationalité malagasy » ; qu’il ressort de l’instruction effectuée par la Haute Cour de céans auprès de l’autorité disposant du pouvoir règlementaire, seule compétente en matière de déclaration ou autorisation de la perte de la nationalité, suivant lettre n°173-PM/SGG/2023 du 8 septembre 2023 du Secrétaire Général du Gouvernement donnant suite à la lettre n°135-HCC/G du 8 septembre 2023 de la Cour de céans, « qu’aucun décret déclarant la perte de la nationalité malagasy en application de l’article 42 du Code de la nationalité malagasy n’a été pris depuis la promulgation dudit Code ; qu’aucun des 28 prétendants à être candidat à l’élection présidentielle du 9 novembre 2023 notamment Monsieur RAJOELINA Andry Nirina n’a fait l’objet d’un décret déclarant ou constatant la perte de la nationalité malagasy ».
La HCC ajoute, dans son arrêt n°06-HCC/AR de la même date du 09/09/23 : « 12. Considérant que de tout ce qui précède, il convient de déclarer les requêtes formulées par Monsieur Hajo Herivelona ANDRIANAINARIVELO, le parti HVM représenté par Monsieur Rivo RAKOTOVAO, le parti TIAKO I MADAGASIKARA représenté par Monsieur Tahiry Ny Riana RANDRIAMASINORO et consorts, le parti FIRAISANKINAN’NY TIA TANINDRAZANA représenté par Monsieur Tahina RAZAFINJOELINA irrecevables ; que par conséquent, il n’y a pas lieu à procéder à une audience publique ;
PAR CES MOTIFS
ARRÊTE
Article premier.- Les requêtes formulées par Monsieur Hajo Herivelona ANDRIANAINARIVELO, le parti HVM représenté par Monsieur Rivo RAKOTOVAO, le parti TIAKO I MADAGASIKARA représenté par Monsieur Tahiry Ny Riana RANDRIAMASINORO et consorts, le parti FIRAISANKINAN’NY TIA TANINDRAZANA représenté par Monsieur Tahina RAZAFINJOELINA sont jointes.
Article 2.- Les requêtes formulées par Monsieur Hajo Herivelona ANDRIANAINARIVELO, le parti HVM représenté par Monsieur Rivo RAKOTOVAO, le parti TIAKO I MADAGASIKARA représenté par Monsieur Tahiry Ny Riana RANDRIAMASINORO et consorts, le parti FIRAISANKINAN’NY TIA TANINDRAZANA représenté par Monsieur Tahina RAZAFINJOELINA sont irrecevables ».
Questions : Qui a signé le certificat de nationalité délivré à Andry Rajoelina ? Pourquoi la HCC refuse-t-elle de juger l’affaire en audience publique ?
Réponses : Etant donné qu’aucun juge du Tribunal de Première Instance (TPI) n’a voulu s’engager dans l’affaire, le gouvernement s’est assigné la responsabilité de le faire… afin de faire valider le dossier du candidat Rajoelina. Ladite lettre n°173-PM/SGG/2023 du 8 septembre 2023 du Secrétaire Général du Gouvernement donnant suite à la lettre n°135-HCC/G du 8 septembre 2023 le confirme. Autrement dit, le gouvernement aurait fait pression sur la HCC afin qu’elle déclare la régularité de la candidature d’Andry Rajoelina, et ce, avant que cette dernière ne publie la liste officielle et définitive des candidats retenus pour ce premier tour de la présidentielle.
On chuchote toutefois qu’au moment où Andry Rajoelina, par le biais de son avocat-mandataire, allait déposer son dossier au greffe de la HCC, il n’y avait pas encore ce fameux certificat de nationalité… mais plutôt une enveloppe contenant quelque chose de sonnante et trébuchante à titre d’on ne sait pas quoi exactement. Rappelons qu’à ce moment-là, Andry Rajoelina était encore au palais des sports de Mahamasina avec son parti TGV, pour annoncer sa candidature à l’élection. Mais tout se comprend : le délai-limite de dépôt des dossiers à la HCC étant imminent, il fallait procéder en même temps à cette annonce de candidature et à la remise des documents à la HCC. Par ailleurs, dans la soirée de ce 9 septembre, une délégation de sénateurs IRD se serait rendue auprès de la HCC pour « accentuer la pression ». Ce qui est étonnant est que d’habitude, la HCC qui n’a jamais effectué une quelconque permanence jusque-là, l’a expressément fait ce jour-là pour recevoir ces parlementaires. Une rencontre nocturne dont peut imaginer qu’il y aurait eu d’obscures discussions entre les deux parties.
Cela étant, une audience publique n’aurait certainement pas arrangé les juges de la HCC dont notamment son président Florent Rakotoarisoa et quelques autres dont on connait leur totale allégeance au Président Rajoelina. Une allégeance qui leur aurait fait perdre leur obligation d’impartialité et qui les a donc amenés à prendre une décision manifestement partiale. On croit savoir qu’au moment de la délibération sur cette affaire, les membres de la Cour étaient en parité égale (4 POUR et 4 CONTRE). Seulement, face à cette parité, la voix du président, une voix dite prépondérante, a fait pencher la décision vers l’acceptation de ce dossier du candidat Rajoelina. Et voilà donc le résultat. Une candidature devenue miraculeusement recevable.
Il reste maintenant à savoir si le TGV (Tsy Gasy fa Vazaha, selon certaines mauvaises langues) sera effectivement à la hauteur de ses nouveaux engagements envers la nation s’il est réélu.
Notons toutefois que plusieurs de ses précédents engagements n’ont pas été remplis jusqu’ici. Comme par exemple, la réhabilitation totale de la Route nationale 13 (RN13) pour laquelle il avait annoncé et promis qu’il ne ferait plus de la politique si cette réhabilitation n’est pas achevée avant la fin de cette année. Mais, il n’y a qu’à constater les réalités de l’heure sur place : les travaux de terrassement de cette route nationale ont bien été entamés mais l’on serait plutôt pessimiste quant à la suite, à savoir son bitumage jusqu’à la fin de cette année. Encore une promesse sinon des paroles dans l’air, dira-t-on. Autre exemple : Andry Rajoelina avait annoncé et promis que son projet de téléphérique dans la capitale serait réalisé avant la tenue des récents jeux des îles de l’océan Indien. Mais encore une fois, il n’y a qu’à voir les réalités de l’heure.
Et finalement, cette fois le chiffre 13 ne va plus lui être favorable, bien qu’il soit le treizième candidat à avoir été accepté par la HCC. Mais d’ailleurs, lors du tirage au sort des numéros d’ordre des candidats dans le bulletin unique, Andry Rajoelina se trouve en troisième position, c’est-à dire le N°3. Ce numéro qui a été plutôt « fatal » à Hery Rajaonarimampianina lorsqu’il était candidat à la présidentielle de 2018 alors qu’il était président sortant de la République. L’histoire pourrait-elle alors se répéter pour cette élection de 2023 ?
Attendre et voir !
Liste des candidats selon leur numéro respectif à l’issue du tirage au sort effectué le 11 septembre au siège de la CENI
- Tahina RAZAFINJOELINA (Firaisankinan’ny Tia Tanindrazana : FTT)
- Hajo Herivelona ANDRIANAINARIVELO (Malagasy Miara-Miainga: MMM)
- Andry Nirina RAJOELINA (Tanora malaGasy Vonona: TGV)
- Iarovana Roland RATSIRAKA (Malagasy Tonga Saina : MTS)
- Marc RAVALOMANANA (Tiako i Madagasikara : TIM)
- Auguste Richard PARAINA (Tsara Tahafina : TT)
- Andriamalala Andry Tsiverizo RAOBELINA (Anjorama sy Rivo-Baovao: ARB)
- Jean Brunelle RAZAFINTSIANDRAOFA (Antoko Politika Madio : APM)
- Lalaina Harilanto RATSIRAHONANA (Antoko Fihavanantsika)
- Hery Martial RAJAONARIMAMPIANINA RAKOTOARIMANANA (Hery Vaovao ho an’i Madagasikara : HVM)
- Sendrison Daniela RADERANIRINA (Fy-M)
- Jean Jacques Jedidia RATSIETISON (Fahefa-mividy no Ilain’ny Malagasy : Fa-Ma)
- Siteny Thierry RANDRIANASOLONIAIKO (Parti Social Démocrate : PSD)
